L'AVENTURE COLONIALE DE LA FRANCE À LA BELLE ÉPOQUE

<= L'armée française de l'été 14

Le fondement de l'idée coloniale ne peut être que l'intérêt... Le seul critérium à appliquer à toute entreprise coloniale, c'est la somme d'avantages et de profits devant découler pour la métropole - Eugène Etienne - député d'Oran - chef du parti colonial à Paris - 1885


L'aventure coloniale fait partie intégrante de la France de la belle-époque. En effet, hormis l'Algèrie, conquise en 1830 pour mettre fin à la piraterie barbaresque (ce qui a permis de libérer les quelques centaines d'esclaves restant suite aux différentes opérations des grandes puissances, il y en avait 30.000 à la grande époque), l'empire colonial s'est constitué aprés 1870, sous l'impulsion du ministère Jules Ferry, particulièrement entre les années 1880 et 1900. Or force est de constater que l'idée coloniale a du lutter pour s'imposer face aux anti-colonistes, et que les partisans de l'expansion coloniale étaient des républicains modérés. Leur argument était économique (nécessité de débouchés hors d'une Europe saturée), humanitaire (fardeau de l'homme blanc, responsabilité des races supérieures de civiliser les races inférieures), et nationaliste (la France devant garder son rang à la tête des peuples civilisés). Leurs adversaires, plutôt de droite (cf. Paul Déroulède), mais pas seulement (e.g. le radical Georges Clémenceau), rétorquaient que l'empire coutait cher, et qu'il valait mieux penser à la revanche (ligne bleue des Vosges, seul horizon légitime).

L'opinion finit par admettre le fait colonial, par indifférence ou parce qu'on y voyait les avantages cités plus haut. 


Commandée par de grands chefs militaires, comme Lyautey au Maroc, Gallièni et Joffre au Tonkin et à Madagascar, Mangin en Afrique noire, l'armée s'engage dans la conquête des territoires en s'appuyant sur sa puissance militaire. Puis Aprés la pacification le système administratif français se met en place, accompagné de commerçants et d'industriels soutenus par le parti colonial. L'aspect culturel et la référence à la mère patrie sont naturellement encouragés par les gouvernements d'alors, qui facilitent aussi une action missionnaire importante grâce aux différents ordres religieux catholiques (alors qu'en France l'anticléricalisme était de rigueur!).

Père Charles de Foucauld, religieux à Tamanrasset (1858-1916):


D'une importance croissante, un conseil supérieur des colonies fut créé en 1883, suivi par une école coloniale en 1889 et enfin un ministère des colonies en 1894.

Le statut des colonies varie bien sur énormément suivant leur date de conquête, leur régime politique antérieur, leur intérêt économique, si la population est calme ou se soulève, etc. On peut avoir de vrais territoires français (Martinique, Guadeloupe, Guyane, etc.) qui bénéficie de la doctrine de l'assimilation, et dont les habitants sont citoyens français depuis 1848. L'algèrie est divisée en trois département français avec un gouverneur général. Dans ce cas précis c'est l'opposition radicale loi française/ loi coranique qui finalement fera que la tentative d'assimilation ne marchera pas, bien que l'Algèrie française ait été une grande réussite (en 1962 ce pays était le plus moderne d'Afrique aprés l'Afrique du sud). D'un autre coté on a des colonies ou des protectorats (Maroc, Tunisie), 

En 1914 la France a le deuxième empire colonial du monde avec 10 millions de kilomètres carrés.


Tunisie: L'intervention en Tunisie est décidée en 1880, encouragée par l'Angleterre (qui lorgne sur l'Egypte) et Bismarck (pour éloigner les français de l'idée de revanche). L'expédition aboutit au traité de Bardo (mai 1881), dans lequel le Bey reconnait la présence militaire française. Il faudra néanmoins plusieurs mois pour la pacification.

Maroc: L'intervention au Maroc est beaucoup plus problématique car elle se heurte à la politique du Kaiser. L'Allemagne est en effet à son tour entraînée dans l'aventure coloniale. Le ministre des affaires étrangères Delcassé avait obtenu l'aval des britanniques pour les entreprises françaises au Maroc, contre quoi était reconnue à la Grande-Bretagne la main-mise sur l'Egypte. Mais en mars 1905 un discours retentissant prononcé à Tanger par Guillaume II, qui se pose en protecteur du Maroc déclenche une grave crise internationale. Celle-ci ne finira qu'avec la conférence d'Algésiras, où la France eut les moyens de pression suffisant sur le sultan du Maroc, ayant eu le soutien de la Russie, de la Grande-Bretagne, de l'Italie et des Etats-unis. 

Une nouvelle crise a lieu en 1911 lorsqu'un navire de guerre allemand est envoyé dans le port d'Agadir en vue d'obtenir une compensation à la pénétration française au Maroc. La diplomatie britannique encourage la France à un arrangement avec l'Allemagne. Dans un premier temps les allemands exigent la cession le Congo français, puis finalement on leur donne la partie intérieure du Congo français, entre le Cameroun et le Congo belge, plus une bande de terre offrant un accés à la mer au territoire, au sud de la colonie espagnole de guinée.

Le protectorat est proclamé en mai 1912, et le général Lyautey, premier résident général, est chargé de pacifier et d'administrer le pays.

La légion étrangère en action au Maroc - Le petit journal 5 octobre 1907


Le sultan du Maroc:



Indochine: L'expédition en indochine a pour but de créer un accés au marché chinois. La France imposent dabord son protectorat sur la Cochinchine et le Cambodge, puis s'emparent du Tonkin et de l'annam (traité de Tien-Tsin de juin 1885), et finalement du Laos en 1893. L'union indochinoise est créée en 1887 pour regrouper les différents territoires conquis depuis 1858. Elle regroupait quatre protectorats, Cambodge, Laos, Annam, Tonkin, et une colonie, la Cochinchine. Le pouvoir était exercé par un gouverneur siégeant à Hanoï.

carte de l'union indochinoise


Madagascar: La main-mise sur Madagascar a lieu elle aussi dans les années 1880. En 1885 la reine Ranavalona III concéde des avantages aux français, dont le controle du port de Diégo-Suarez. En 1895 a lieu l'expédition française aboutissant à la reconnaissance du protectorat français sur Tananarive. La pacification de l'île est confiée à Galliéni.

La conquête de Madagascar

Manifestation patriotique pour le départ du 200° pour Madagascar - Le petit journal Dimanche 24 mars 1895:



Afrique noire: En Afrique Noire la France posséde déjà, au début des années 1880, le Sénégal ainsi qu'un certain nombre de comptoirs en Guinée et en Côte d'Ivoire. La pénétration en Afrique occidentale se fait contre des troupes indigénes divisées entre-elles et luttant aussi contre les britanniques. En Afrique équatoriale la pénétration commence avec les expéditions de Savorgnan de Brazza qui aboutissent à former le noyau de la future Afrique équatoriale française.

Les années suivantes voient la conquête continuer et se constituer l'Afrique Occidentale française (AOF) en 1895 et l'Afrique Equatoriale Française (AEF) en 1908, tandis que le controle du Sahara permet de relier l'Afrique noire à l'Afrique du nord. L'AOF regroupait le Sénégal, le Soudan français (Mali et Burkina actuels), la Guinée, la Côte d'Ivoire, le Dahomey (Bénin actuel), le Niger et la Mauritanie, sous la houlette d'un gouvernement général à Dakar. L'AEF regroupait le Gabon, le Moyen-Congo (république populaire du Congo actuel), l'Oubangi-Chari (république de Centrafrique actuel) et le Tchad, avec pour capitale fédérale Brazzaville.

Savorgnan de Brazza, explore le congo en 1875, puis organise cette colonie entre 1886 et 1898:

Le colonel Marchand dans la forêt vierge durant la mission Congo-Nil vers 1898 - Supplément illustré du petit journal (à gauche) - Dans le monde moderne 1899 (à droite

Mission Congo-Nil du colonel Marchand

Le commandant Marchand - Le monde moderne 1899

Le commandant Marchand

Le drapeau français flotte sur Tombouctou - Supplément illustré du petit journal février 1894

Drapeau français flottant sur Tombouctou - 1894


Carte de l'Afrique d'aprés la convention franco-anglaise - supplément illustré du petit journal Dimanche 9 avril 1899:


Affiche de 1900 célébrant la colonisation française:

Affiche célébrant la colonisation


Source: La belle époque - Michel Winock - Tempus - 2003
Les soldats des colonies - Chantal Antier-Renaud - Christian Le Corre - Ouest France - 2008